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Laissez-moi vous conter l’Islande des hautes terres

A la découverte de l’Islande de l’intérieur

L’été venu, nous avons la chance de pouvoir traverser l’Islande de part en part grâce à l’ouverture des pistes intérieures – l’arrière-pays accessible uniquement en 4×4 – .  La neige a fondu et la terre a séché : s’il est vrai que quelques islandais téméraires s’aventurent l’hiver dans le désert, puisque recouvert de neige, le printemps y rend les pistes boueuses et impraticables. L’été est donc, LA, saison pour découvrir l’intérieur du pays : ses déserts multicolores, ses glaciers, ses volcans ainsi que tous les trésors cachés qui me seront  sans doute impossible de vous faire découvrir dans leur globalité ici.

Kerlingarfjoll : le massif aux sorcières

Pour rentrer dans cet univers, il nous faut un véhicule tout terrain,  quelques jerricans d’essence et de bonnes chaussures  de marche pour fouler ce désert  volcanique. La traversé de l’Islande peut se faire par deux pistes : Sprengisandur et Kjolur. Je choisi de vous faire découvrir dans un premier temps la piste de Kjolur depuis la fameuse chute de Gullfos. Cette piste fait environ  180 km de long et est pratiquée depuis le début de la colonisation pour traverser l’île. En empruntant cette piste, nous marchons donc sur les traces des premiers vikings.

Dès les premiers kilomètres, l’aventure est déjà là. Notre entrée dans le désert islandais ne reste pas sans témoins: au loin les sorcières de Kerlingarfjoll gardent leur massif. Les trolls de pierre nous observent mais, en ce qui nous concerne,  nos regards restent fascinés par le bleu givré  des glaciers – Hofjokull et Langjokull – au loin et la couleur turquoise des lacs. Nous sommes encerclés par la cruelle beauté de l’Islande.

Même pas peur ! Je choisi de vous présenter aux dames de Kerlingarfjoll, qui signifie littéralement le massif des sorcières. Magnifique massif aux milles couleurs, drapés rhyolitiques,  fumerolles et solfatares de toute part, le paysage y est surnaturel. Surprenante Islande ! Les névés  y sont des neiges quasi éternelles qui nous permettent quelques excentricités. On peut ainsi s’éviter les descentes dans les pierriers en optant pour un mode de transport bien plus ludique tel que la luge sur sacs plastiques! Pied de nez aux sorcières qui ne nous lâchent pas du regard.

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Eyvindur et les hauts plateaux 

Si sur la  première partie de la F35 (piste de Kjolur) nous avons croisé les sorcières de Kerlingarfjoll, ici, dans les hauts plateaux vit aussi l’âme du plus célèbre bandit islandais. L’histoire raconte que pourchassé de toutes parts, Eyvindur des montagnes, célèbre bandit d’Islande a forgé sa légende en errant pendant vingt années passées en exil au cœur des déserts centraux de l’Islande, à l’heure actuel toujours empreints de son passage. Pris d’admiration au vu de pareil exploit, le peuple aurait, par une volte-face dont il a le secret, demandé sa grâce.  Il fait maintenant figure de héros national : image du viking tout puissant face à une nature extrêmement rude. C’est à Hveravellir, que nous  y retrouvons sa trace : dans des tunnels de laves où il aurait séjourné avec sa femme Fjalla, je vous raconte l’histoire de ces  « prisonniers de la liberté ». Hveravellir nous offre l’opportunité d’une baignade dans une piscine d’eau naturellement chauffée. Nous sommes bel et bien au pays des volcans.

Les chevaux islandais aussi se sont enfin réapproprié le territoire des hauts plateaux: au tölt ou au galop, des troupeaux entiers servent de montures pour des aventuriers, qui, tout comme nous, sont en quête de grands espaces. D’ailleurs, pourquoi ne pas nous arrêter dans une ferme équestre pour couper notre journée de route avant de sortir du désert et rejoindre la côte nord de l’Islande ? Quelques caresses à ces charmants équidés nous permettent d’étudier l’animal sous toutes ses coutures. Attention, surtout ne jamais dire à un islandais qu’il s’agit là de poneys malgré la petite taille de l’animal. Ils risqueraient de mal le prendre.

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Herdubreid : le volcan préféré des islandais

Nous avons précédemment quitté le désert en atteignant la mer du Groenland au niveau de la péninsule de Vatnes, à l’est d’Akureyri (seconde ville du pays). Je ne m’attarde pas sur cette ville, ni sur la région du lac Myvatn  au nord de l’Islande, car ce dont j’ai envie de vous parler aujourd’hui c’est du caractère exceptionnel de l’intérieur des terres islandaises.

Nous y revenons donc tout de suite et retournons  dans le désert par la piste F88 en roulant tout droit vers le centre géographique de l’île, depuis le Nord vers le Sud. Contrairement à Kjolur, la piste empruntée précédemment, ici,  nous avons un protecteur : Herdurbreid, LE volcan, celui « aux larges épaules »que j’aime décrire comme un gros cup cake sur lequel on aurait déposé une cerise au sommet. Les islandais disent que c’est « the Queen of Iceland ». Du haut de ses 1682 mètres d’altitude cette montagne en table  est un volcan datant de l’ère glaciaire : la lave en perçant la couche de glace lui aurait donné sa forme si particulière. La piste traverse des champs de lave et le vent fait tournoyer du sable noir.  Au pied de ce molosse, nous pouvons faire une halte ou même passer la nuit dans un vallon verdoyant : l’oasis d’Herdurbreidarlindir.  Un refuge, entouré d’angéliques et épilobes, aux allures de maison de poupée nous y attend. Si l’on tend l’oreille on peut même y entendre le chant d’une famille de cygnes qui y a élu domicile.

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Askja : bienvenus au cœur d’un volcan

En route vers le sud pour traverser le désert d’Odadahraun, celui dit des méfaits (ou des crimes). Là aussi se réfugiaient les meurtriers, hors-la-loi et proscrit dont également le fameux Eyvindur que je vous ai déjà présenté auparavant. Abrité des pluies par la calotte glaciaire du Vatnajokull (le plus grand glacier d’Europe), ce désert est la plus vaste zone de lave du pays : il faut savoir qu’il couvre une surface de 6000 km2. D’ailleurs, c’est aussi sur ce terrain que les astronautes américains s’entraînèrent avant d’aller sur la Lune.

Au milieu de ce paysage minéral, notre progression vers le centre du pays nous fait passer du noir au blanc. En effet, le sable noir laisse place au désert de pierre ponce : cailloux beiges ocres extrêmement légers, cette roche volcanique pleine de bulles d’air a été éjectée par l’Askja au début des éruptions de 1875 et 1961.  Après le cup-cake passons aux choses sérieuses en ouvrant la bouteille de champagne. ! Je vous laisse imaginer une bouteille de champagne qu’on aurait secouée : la mousse sort en premier. Il en est de même pour les éruptions de pierres ponces. La pierre ponce – mousse de lave figée – flotte sur l’eau. Le jeu consiste alors à soulever d’énormes roches de pierre ponce sans le moindre effort.  A vos appareils photos !

Mais qui est donc l’Asjka ?  Quelques kilomètres encore et nous y voilà.  Aujourd’hui, vous avez le privilège de marcher au centre d’un volcan. En effet, Askja, littéralement « caldera » est un massif né de l’effondrement d’une chambre magmatique.  Dans cet emboîtement de cratères vidés de toute lave, vaste dépression de 40 km², deux lacs servent de miroir au versant de la caldera principal hauts de 250 à 400 mètre.  Le plus petit lac, le Viti autrement dit l’Enfer, nous laisser perplexe : couleur laiteuse et eau chauffée à plus de 38 degrés.  Je me redis maintenant que de découvrir le cœur d’un volcan comme un cœur qui bat toujours ne peut qu’être un souvenir magique.

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On fini par une anecdote? 

Pour compléter le tableau de cette terre sans âme qui vive – du moins humaine -,  rien de tel qu’une anecdote digne d’un scénario de film: le  plus grand des deux lacs, l’ Öskjuvatn, qui est le lac le plus profond d’Islande  (220 mètres tout de même ! ) noya deux chercheurs allemands qui y coulèrent dans leur barque en 1907. Leur barque ne fut jamais retrouvée. Mais après tout cela n’est qu’histoire…

Ne me dites pas que vous croyez à  une malédiction ? Les trolls ne sont surement vivants que par l’imagination de ceux qui en parle. Car si l’Islande est la terre des trolls c’est aussi celle des Elfes : esprits bienfaiteurs de la nature. Ils sont les gardiens des paysages merveilleux  que nous avons la chance de découvrir, de cette expérience, unique et privilégiée, née de la rencontre avec les déserts islandais, de cette sensation étrange qui nous fait dire qu’ici nous pouvons toucher au commencement du monde , être présent là où tout commence.

Si jamais, vous avez envie de poser tout cela sur le papier, sachez qu’Askja cache un livre d’or à la disposition de tous les poètes ou simple témoins du vivant de notre planète.

Vous venez de prononcer le mot mystique ? Je vous l’avoue on en est pas loin…

L’Islande de l’intérieur regorge encore de nombreux trésors. Pour sortir du désert et rejoindre le littoral de l’île il n’est pas forcément nécessaire de retourner sur nos pas. La piste sud F910, ouverte seulement quelques semaines dans l’année nous permet de rejoindre la piste de Sprengisandur à l’ouest de la caldera d’Askja. Considérer comme la piste la plus difficile d’Islande,  je me dois de lui offrir son propre carnet de voyage car là aussi il s’agit d’une autre histoire, d’un autre secret que les terres islandaise conservent précieusement.